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FEMME ACTUELLE : "Témoignages : elles se battent pour faire entendre la voix des femmes" (Article du 7 mars 2023)

Ces trois femmes sont parfois menacées pour leur combat ou ont vécu dans leur chair l’oppression et la violence. Malgré les difficultés, elles ne lâchent pas, se battent pour faire entendre la voix des femmes .

Reconnu par l’ONU, le 8 mars n’est pas la Journée de la femme, mais celle des droits des femmes dans le monde ! Le moment de donner la parole à des anonymes qui luttent toute l’année pour réparer des injustices. Et elles sont nombreuses… En Afghanistan, les talibans interdisent aux filles l’accès au collège et au lycée. Les femmes ne peuvent plus se déplacer au-delà de 72 kilomètres sans être accompagnées par un tuteur masculin. En Turquie, la lutte contre les violences faites aux femmes est mise à mal depuis que le pays s’est retiré, en 2021, de la Convention d’Istanbul*. Deux exemples parmi d’autres qui illustrent le constat dressé par Amnesty International : dans de nombreux pays, nos droits régressent. Pourtant, malgré ces reculs, des avancées existent, obtenues grâce à la détermination de femmes et hommes engagés. « Les efforts inlassables des défenseurs des droits humains ne sont pas vains », note l’ONG avec raison. La Colombie et le Mexique ont « dépénalisé » l’avortement. Certains pays, comme le Gabon, ont fait évoluer leur législation pour mieux lutter contre les violences domestiques. Les faits en témoignent : l’engagement sous toutes ses formes – oser prendre la parole, organiser des campagnes de plaidoyer, sensibiliser l’opinion publique, donner un écho à des situations vécues – est porteur de résultats.

Dire stop aux mutilations

J’étais en vacances chez mes grands-parents avec mes deux sœurs aînées. Un matin, on a été amenées par des tantes dans une cour, en plein Conakry. On a été excisées les unes après les autres, nos parents n’étaient pas au courant. Les douleurs sont restées vives pendant longtemps et resurgissent encore aujourd’hui. L’urgence est d’informer sur les conséquences de ces violences (infection des voies urinaires, complications obstétricales) et de rappeler qu’elles sont punies par la loi, en France mais aussi dans les pays où elles sont pratiquées. L’une des périodes les plus sensibles est celle des vacances scolaires, car les jeunes filles se rendent dans leur pays d’origine et peuvent en être victimes. La Somalie, la Guinée, Djibouti, l’Égypte et l’Érythrée sont les plus à risque. L’Unicef estime à 200 millions le nombre de femmes ayant subi une mutilation sexuelle dans plus de 90 pays.

Anita Traoré, 31 ans

Née en Guinée et victime d’une excision à l’âge de 8 ans, elle est arrivée en France en 2005. Aujourd’hui, elle lutte contre les différentes formes de mutilations sexuelles féminines au sein de deux associations, Chance et Protection Pour Toutes qu’elle a fondé et qu’elle préside et Excision, parlons-en dont elle est vice présidente !

Aider les femmes à défendre leurs droits

En Iran, la loi est du côté des hommes en matière de mariage, de divorce, d’accès à l’emploi… On peut être la plus brillante, la meilleure dans ce que l’on fait, on a intériorisé l’humiliation. La révolution féministe, déclenchée par la mort de Mahsa Jina Amini** le 16 septembre dernier, réclame l’égalité entre les femmes et les hommes. La répression est ultra-violente – on compte plus de 500 morts dans les rues, dont plus de 70 enfants – mais la mobilisation ne faiblit pas. Depuis la France, mon combat vise à sensibiliser l’opinion publique à la condition des femmes iraniennes. Je fais aussi partie d’un collectif de juristes qui transmet de l’information juridique à la population restée sur place. Le but est de l’aider à se défendre contre des sentences infondées. Car, aujourd’hui, l’état de droit est tellement attaqué que le régime ne respecte même plus ses propres lois.

Mehrnaz Behzad, 34 ans

Née en 1988 à Téhéran, elle a connu la répression massive menée par le président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad. Elle a rejoint la France en 2011. Devenue juriste, elle s’engage aujourd’hui pour les droits des femmes iraniennes.

** Jeune femme de 22 ans décédée trois jours après avoir été arrêtée par la police des mœurs pour un voile mal ajusté.

Encourager les filles à ne pas baisser les bras

J’ai enseigné la photographie à l’université de Kaboul pendant trois ans. Je transmettais à mes élèves l’idée que l’on peut être une femme photographe et parler des femmes. Mais à cause des extrémistes religieux, qui ne supportaient pas ma liberté et mon discours critique vis-à-vis de la place des femmes dans le pays, j’ai dû m’enfuir. Le retour des talibans en 2021 a été un nouveau coup de massue. Aujourd’hui, je continue à m’adresser aux générations futures, via les plateformes en ligne. Je poursuis ce travail d’éducation et d’éclairage sur ce qui se passe dans le pays. Je veux encourager les filles à ne pas baisser les bras, même si le désespoir est grand. Les femmes sont effacées de la société, elles sont emprisonnées dans leur maison, souffrent de stress et de troubles psychologiques. Elles ont perdu leur vie, leur futur.

Hanifa Alizada, 33 ans

Elle est née en 1989 en Afghanistan. Après des études en art visuel au Pakistan, elle est devenue enseignante à l’Université de Kaboul. Elle a dû quitter son pays en 2015 sous la menace des extrémistes religieux.

*Ce traité international contraint les États à légiférer pour prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes.

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LE FIGARO : «J'ai entendu mes sœurs hurler»: en France, la lente reconstruction des femmes victimes d'excision" (Article du 7 février 2023)

Par Jeanne Durieux

Publié le 06/02/2023 à 16:54 , Mis à jour le 07/02/2023 à 09:58

TÉMOIGNAGES – Elles sont 125.000 femmes vivant en France à avoir été victimes d’une excision. Certaines d’entre elles cherchent à se reconstruire en s’investissant dans la lutte contre cette pratique néfaste.

L’émotion mêlée aux regrets enroue la voix de Rhama*, quand elle se rappelle cet après-midi. «Je suis rentrée chez moi après m’être absentée trente minutes. Ma fille était sur la table, elle saignait, et ma mère m’a dit: “C’est comme ça, elle doit y passer aussi”.» Rhama vient de Djibouti. À l’âge de 5 ans, elle a été excisée par les femmes de son quartier.

Alors, quand Rhama est devenue mère, elle a quitté son pays pour la France, où elle espérait ainsi pouvoir éviter ce sort à sa propre fille. Dans l’Hexagone, les mutilations génitales féminines sont passibles de 10 ans d’emprisonnement et de 150.000 euros d’amende. C’était sans compter ce bref séjour passé avec sa fille à Djibouti chez sa mère, traditionaliste acharnée, qui a fait venir cet après-midi-là les exciseuses. Lauria avait 6 mois. Elle est décédée d’une infection généralisée quelques semaines plus tard.

Excision, infibulation… Lundi 6 février, une journée de lutte est consacrée à ces mutilations génitales féminines (MSF), pratiques traditionnelles très répandues en Afrique de l’Ouest, qui consistent en l’ablation partielle ou totale des organes génitaux de la femme. Elles concernent actuellement 125.000 femmes en France*, et 200 millions de femmes dans le monde**, majoritairement originaires de cette partie du continent africain, où la quasi-totalité des pays interdisent la pratique. Aujourd’hui, leur parcours de reconstruction après le traumatisme de l’excision reste difficile et semé d’embûches.

«J’ai été mutilée, à vif»

En Guinée, 97% des femmes âgées de 15 à 49 ans ont subi des mutilations génitales. Le pays les a pourtant abolies en 2001. Une épreuve vécue par Anita Traoré. Originaire de Guinée, la jeune femme de 31 ans vit aujourd’hui à Tours. Elle a été excisée à l’âge de 8 ans. «À Conakry, la capitale, précise-t-elle. Et pas dans un village reculé, contrairement à ce que l’on croit aujourd’hui.»

«Mon père était professeur de philosophie, et ma mère journaliste: les deux s’opposaient à ce que mes sœurs et moi soyons excisées», raconte Anita. Dans sa famille, les membres les plus traditionalistes ne sont pas de cet avis. Preuve que la protection des parents, quand ils sont opposés à la pratique, n’est pas suffisante, Anita et ses sœurs seront quand même excisées. «On était chez mes grands-parents en vacances scolaires, et mes tantes nous ont invitées à une fête d’anniversaire qui avait lieu le lendemain.» À peine arrivées à la fête, Anita et ses sœurs sont poussées vers une pièce sombre par les femmes qui organisent la réception. «J’étais la dernière, se souvient Anita. J’ai entendu mes sœurs hurler, puis je les ai vues sortir de cette pièce sombre, à moitié évanouies.» Vient ensuite le tour d’Anita. Dans la pénombre de la maison, la petite fille est immobilisée par quatre personnes, tandis qu’une cinquième s’approche avec un rasoir. «J’ai été mutilée, à vif.» Sous le choc, les quatre sœurs sont ensuite emmenées dans une maison où elles resteront quarante jours. Là, des visiteurs viennent leur offrir argent et présents. «Il fallait être heureuse, parce que tout le monde nous félicitait», se souvient Anita, bouleversée.

De cette opération barbare, réalisée sans anesthésie et dans des conditions d’hygiène approximatives, les femmes, une fois adultes, conservent de nombreux maux physiques ressentis lors de rapports sexuels mais aussi pendant l’accouchement. Alors, pour dépasser la douleur et le traumatisme, beaucoup d’entre elles s’engagent dans la lutte contre l’excision.

Petite, j’attendais mon excision comme on attend le jour de Noël, en ne voyant que les cadeaux, sans l’opération

Martha

Anita est devenue présidente et fondatrice de l’association «Chance et protection pour toutes», qui possède entre autres une antenne en France et une en Guinée. En France, elle intervient en milieu scolaire et social pour sensibiliser un large public. Ses efforts s’intensifient surtout à l’approche des vacances, «le moment où les petites filles rentrent au pays voir leur famille».

En France, de plus en plus de centres proposent aux femmes qui le souhaitent une écoute, des informations, et la reconstruction chirurgicale pour celles qui l’envisagent. «C’est l’une des violences sexuelles les plus graves», déplore Ghada Hatem, gynécologue obstétricienne à la Maison des femmes de Saint-Denis, dédiée entre autres à la reconstruction de celles qui ont subi une excision. «Assez de mortes, assez de traumatisées à vie», abonde de son côté Anita.

Originaire d’un village au nord de la Côte d’Ivoire, Martha, 48 ans, qui descend d’une longue lignée d’exciseuses, a elle aussi choisi de passer du côté de la lutte. «Petite, j’attendais mon excision comme on attend Noël», se souvient-elle. «C’est une grande fête, on reçoit à ce moment les secrets de la vie par les “matrones”». Ces exciseuses, qui se transmettent la pratique de mère en fille, sont considérées comme des personnalités essentielles du village dans le passage de la jeune fille à l’âge adulte.

Poids de la tradition

Martha, qui travaille dans une association de lutte contre l’excision basée à Rennes, «Azca», souligne en revanche l’importance de comprendre le poids de la tradition dans une telle pratique: «On ne peut arriver dans un village africain en mettant le panneau “Excision interdite”, puis repartir. Ça ne marche pas comme ça !». Et de marteler: «Si on ne comprend pas l’aspect communautaire, on ne peut pas lutter».

Selon elle, la lutte contre les MSF doit s’adapter à chaque région, voire à chaque village. «Il faut prendre les matrones dans la boucle, leur montrer les parcours de reconversion, assène-t-elle. Et mettre en avant le fait qu’on peut maintenir ces rites de transition à l’âge adulte tout en abolissant les mutilations.» Son association, qui travaille en Côte d’Ivoire depuis quinze ans, a obtenu la reconversion de trente-cinq exciseuses. «C’est déjà une grande victoire, vu l’ancrage millénaire de l’excision dans nos pratiques africaines», se réjouit-elle.

D’autres choisissent de s’exiler. Rokhya, qui vient d’un village près de Bamako, au Mali, est arrivée en France en 2019, sa petite fille dans les bras. «Rester au pays, c’était garantir son excision», affirme-t-elle. Alors, la jeune femme et son mari ont formulé une demande d’asile au motif de la menace d’excision qui pesait sur leur enfant. Ils l’ont obtenue et vivent désormais à Maisons-Alfort, sans aucun contact avec leur famille. Pour eux, couper les ponts était la seule solution. «C’est difficile, témoigne Rokhya. Mais quand je suis partie, une amie venait de perdre son enfant, morte d’infection après avoir été mutilée. Je ne pouvais pas accepter ça pour ma fille.»

*Estimation du Bulletin épidémiologique hebdomadaire datée de 15 février 2019.

**Bilan de l’Unicef 2022

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ISNEWS : "Excision : et si on en parlait ?" (Article du 24 décembre 2021)

Pratique ancestrale, les mutilations sexuelles féminines (MSF) concernent aujourd’hui encore au moins 200 millions de femmes et de filles dans le monde, à travers plus de 90 pays et tous les continents, à l’exception de l’Antarctique ! En tant qu’atteinte aux droits humains et à l’intégrité physique basée sur la domination masculine sur le corps et la sexualité des femmes, elles nous concernent toutes et tous.

Depuis plus de trente ans, la société civile du monde entier s’est mobilisée pour mettre fin à l’excision. L’abandon total des MSF d’ici à 2030 est inscrit dans la cible 5.3 des Objectifs de Développement durable (ODD).

Mais qu’est-ce que l’excision ?

Bien que l’excision soit une forme particulière de mutilation sexuelle féminine (type 11), l’appellation est parfois employée dans son acception générique comme synonyme de MSF. Les mutilations sexuelles féminines concerner toute personne née avec une vulve, toutes identités de genre confondues.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) regroupe sous le terme de mutilations génitales féminines/excision (Female Genital Mutilation/Cutting, FGM/C) toutes les pratiques qui entraînent une ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme ou d’autres lésions à des fins non médicales.

Il existe plusieurs types d’excision :

Type I (clitoridectomie): ablation partielle ou totale du clitoris externe et/ou du capuchon du clitoris.
Type II (excision): ablation partielle ou totale du clitoris externe et des petites lèvres avec/sans ablation des grandes lèvres.
Type III (infibulation ou «excision pharaonique»): rétrécissement de l’orifice vaginal avec recouvrement par l’ablation et l’accolement des petites lèvres et/ou des grandes lèvres, avec ou sans excision du clitoris.
Type IV: toutes les autres interventions néfastes au niveau des organes génitaux féminins à des fins non médicales, par exemple la perforation ou le déchirement des organes génitaux internes et externes.
« Nous ne parviendrons à l’abandon de l’excision qu’en travaillant main dans la main et en renforçant les ponts entre les acteurs et actrices de terrain, en France et dans le monde. » Ramata Kapo, présidente d’Excision, parlons-en !

Pratique vraiment avantageuses ?

Bien que dans certaines cultures l’excision est mis au même pied que la circoncision, elle ne présente aucun avantage pour la santé et entraine de graves conséquences physiques (douleurs, infections des voies urinaires, complications obstétricales…), mais aussi psychologiques et sexuelles tout au long de la vie des femmes.

Parmi les risques auxquels sont exposées les filles et les femmes victimes d’excision, il est possible de citer :

Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) : l’utilisation d’un même instrument non stérilisé pour l’excision de plusieurs filles est susceptible d’accroître le risque de transmission du VIH. Par ailleurs, l’augmentation du risque des saignements au cours des rapports sexuels, qui est fréquent lorsque la désinfibulation est nécessaire, peut accroître le risque de transmission du VIH.

Les répercussions sur le nouveau-né : les résultats d’une étude menée par l’Organisation mondiale de la Santé sur 28 000 femmes dans différents pays, prouvent que les mutilations sexuelles des mères ont des conséquences négatives sur les nouveau-nés : les taux de décès périnatal chez les nouveau-nés sont plus élevés pour les enfants des femmes ayant subi une mutilation sexuelle que pour les enfants des femmes n’ayant pas subi de mutilation (supérieur de 15 % pour les enfants dont les mères ont subi une mutilation de type I, de 32 % lorsque les mères ont subi une mutilation de type II, et de 55 % lorsqu’il s’agit d’une mutilation sexuelle de type III) (L’étude a porté sur 28 393 femmes dans 28 centres de soins obstétricaux de six pays où les mutilations génitales sont courantes – Burkina Faso, Ghana, Kenya, Nigeria, Sénégal et Soudan.)

Déscolarisation : Les filles qui subissent des mutilations génitales féminines courent plus de risques d’être mariées avant l’âge adulte et d’abandonner l’école, ce qui hypothèque leurs perspectives d’un avenir meilleur pour elles et leurs communautés.

Dans la plupart des cas, les conséquences catastrophiques de cette forme de mutilation génitale féminine sont inconnues des populations la pratiquant. En effet, la majorité des femmes excisées qui rencontrent ces problèmes ne savent pas que ceux-ci sont liés à l’excision dont elles ont été victimes enfants, ces problèmes ne survenant pour la plupart qu’au moment de la puberté.

Pourtant, dans le monde, 200 millions de femmes et de fillettes ont subi une mutilation sexuelle féminine (Unicef, 2016) et une fille est encore excisée toutes les dix secondes.

Pourquoi continuer ?

Le maintien de la pratique est sous-tendu par un ensemble de croyances culturelles, religieuses » et sociales. Les raisons invoquées par les groupes qui perpétuent l’excision peuvent varier d’une région, ethnie communauté à l’autre et peuvent se cumuler.

Dans certaines communautés, elles sont vues comme un moyen d’asservir la sexualité des filles ou une garantie de chasteté. Dans d’autres communautés, elles constituent un prérequis au mariage ou à la succession. Dans les sociétés où cette pratique est le plus répandue, elle est souvent considérée comme un rite de passage pour les filles. Les mutilations génitales féminines ne sont pas approuvées par l’islam ou le christianisme, mais les croyances liées à la religion sont fréquemment invoquées pour justifier leur pratique.

Globalement, il s’agit d’une norme sociale : les MSF sont perpétuées en raison d’un sentiment d’obligation sociale fort, dans le but de protéger les filles de la stigmatisation et de la marginalisation, mais nous pouvons également entendre des arguments comme, la favorisation de la fécondité.

Médecins complices ?

La médicalisation des MSF désigne les « situations dans lesquelles ces mutilations (y compris la réinfibulation) sont pratiquées par une catégorie ou une autre de personnel de santé, que ce soit dans un dispensaire privé ou public, à domicile ou ailleurs, à n’importe quel stade de la vie d’une femme. » (OMS).

Si depuis les 27 siècles que l’excision existe, des professionnelles de santé ont pratiqué des MSF, la médicalisation semble en augmentation depuis le début des années 2000″.

On estime qu’elle concernerait aujourd’hui plus d’un quart des MSF dans le monde, en particulier au Soudan (plus de 75 % des MSF pratiquées dans le pays), en Égypte, au Kenya, en Guinée et au Nigéria. L’Indonésie, la Malaisie, le Mali et le Yémen présentent également une forte hausse de la médicalisation.

Dans certains pays, comme l’Egypte ou la Malaisie, ce nouveau cadre a malheureusement été considéré par certaines associations et les gouvernements comme une solution acceptable, expliquent les chercheuses. Il aura fallu la mobilisation de la Fédération internationale des gynécologues obstétriciens pour que peu à peu la médicalisation soit interdite officiellement dans la plupart des pays, à l’exception notable de l’Indonésie.

Comment faire évoluer la cause ?

Les efforts déployés à l’échelle internationale ont permis d’accélérer les progrès réalisés pour éradiquer les mutilations génitales féminines. Aujourd’hui, les risques que court une fille de subir une excision sont réduits d’environ un tiers par rapport à il y a 30 ans.

Cependant, le maintien des résultats obtenus malgré la croissance démographique représente une difficulté majeure. D’ici à 2030, dans le monde, plus d’une fille sur trois naîtra dans l’un des 31 pays où les mutilations génitales féminines sont répandues. En conséquence, quelque 68 millions de filles âgées de moins de 15 ans, dont des nourrissons, seront exposées à un risque d’excision.

À l’heure actuelle, les MGF sont considérées comme « une affaire de femmes ». Les hommes n’interviennent que très rarement dans le processus de la pratique des MGF et leurs positions sur le sujet sont souvent floues. Or, les MGF concernent tous les membres de la communauté. La lutte contre les MGF passe donc aussi par l’implication des hommes et leur sensibilisation à la pratique.

Pour rappel ! Ces pratiques sont aujourd’hui définitivement reconnues par la communauté internationale comme une forme de violation des droits humains – une violation doublée d’une atteinte grave à la santé des jeunes filles et des femmes concernées.

Un grand MERCI à Excision, parlons-en ! et Anita Traore vice-présidente de l’association, et présidente-fondatrice de l’Association Chance et Protection Pour Toutes (ACPPT) ! Pour l’envoie de leur rapport m’ayant permis la rédaction de cet article n’hésitez pas à faire un don pour faire avancer leur cause.

Par Aboubacar KONTE

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MARIANNE : "Des petites filles croient partir en vacances mais en réalité vont se faire exciser" (Article du 8 juillet 2021)

 

Par Célia Cuordifede
Publié le 08/07/2021 à 17:49

Chaque année, des dizaines de petites filles et adolescentes françaises partent en vacances dans le pays d’origine de leurs parents et y subissent des excisions, c’est-à-dire l’ablation de leur clitoris. En ce début d’été, l’association « Excision, parlons-en ! » lance sa cinquième campagne de prévention contre les mutilations sexuelles.
À l’été 2020, Fadima*, alors âgée de 14 ans, y a échappé de peu. C’était la première fois qu’elle quittait sa Nièvre natale pour rejoindre le pays d’origine de ses parents : la Guinée. Quelques jours après son arrivée, des bruits de couloir dans la maison de famille lui font comprendre qu’une cérémonie se prépare. Non pas pour fêter sa première visite au pays… mais pour organiser son excision, c’est-à-dire l’ablation de son clitoris. Interdite en France, cette mutilation sexuelle reste pratiquée comme un rituel dans de nombreux pays d’Afrique et d’Asie, essentiellement musulmans (Égypte, Soudan, Somalie, Guinée, Mali, Mauritanie, Sénégal, Malaisie, Indonésie…). Ses promoteurs invoquent plusieurs raisons : l’interdiction de l’orgasme à la femme (considéré comme impur), l’amélioration du plaisir de l’homme ou encore l’hygiène (argument démenti par le corps médical).

« Complètement paniquée, Fadima nous a contactés pour qu’on l’aide à sortir de cette situation », se remémore Anita Traoré, présidente et fondatrice de l’association « chance et protection pour toutes » (ACPPT). Basée en France, son association dispose de relais en Guinée où l’excision de jeunes femmes françaises pendant leurs vacances estivales au village familial est monnaie courante. « On a tout de suite envoyé une équipe pour lui rendre visite et la rassurer, lui montrer qu’elle n’était pas seule. Puis, nous avons discuté avec la famille pour tenter d’éviter la catastrophe », poursuit Anita Traoré. Dans le même temps, l’association a mis en alerte les services de la protection de l’enfance en Guinée.

125 000 femmes vivant en France ont été mutilées sexuellement

Fadima a été sauvée cet été-là. Dans son malheur, l’adolescente a eu une chance, celle d’être française. « Quand les signalements touchent des petites filles françaises, ça calme les esprits mal intentionnés, précise Anita Traoré. Ils savent que ça peut se retourner contre eux car ces filles-là ont davantage de droits, en tout cas leurs droits sont mieux respectés, que ceux des Guinéennes. Les lois contre les mutilations sexuelles sont appliquées en France, contrairement à la Guinée.» Ce même été, plusieurs de ses cousines, du même âge, n’ont pas pu échapper à l’excision.

Fadima n’est pas une exception. « Impossible d’avoir des chiffres précis, mais les témoignages sont là. C’est un fait, il y a des petites filles qui croient partir en vacances mais en réalité elles vont se faire exciser », signale Ramata Kapo, présidente de l’association Excision, parlons-en !, à l’origine d’une campagne de prévention et de sensibilisation contre l’excision pendant les vacances estivales. En France, les dernières données de Santé publique France révèlent que 125 000 femmes ont été mutilées sexuellement. Dont certaines en France, de façon clandestine, puisque la pratique est passible de prison, jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle. « Trois jeunes filles sur dix dont les parents sont originaires d’un pays pratiquant l’excision sont menacées », affirme Ramata Kapo, citant des chiffres de MSF (Médecins Sans Frontières).

Anita Traoré a elle-même subi ce drame lorsqu’elle avait 8 ans. « Nous étions en vacances chez nos grands-parents à Conakry, avec mes deux sœurs et l’une de mes cousines », se remémore-t-elle. Jusqu’à ce que l’une de ses tantes les conduise dans la cour d’une maison, où une à une, elles ont dû endurer l’ablation leur clitoris dans un cabinet médical de fortune. Leurs parents, totalement opposés, ne l’ont appris qu’après coup. « En Guinée 96 % des femmes sont excisées, avance la jeune femme en citant des chiffres de l’Unicef. Le fait que nous ne l’étions pas était hors norme. » Aujourd’hui, la jeune mère de famille subit encore les multiples conséquences de ces mutilations : infections à répétition, douleurs pendant les rapports sexuels. Tandis que beaucoup de femmes excisées vivent des complications lors de leur accouchement. Des maux physiques auxquels il faut ajouter des blessures psychologiques issues d’un souvenir indélébile de maltraitance. « Si j’avais été sensibilisée sur ce qu’est l’excision, je me serais enfuie de cette cour dans laquelle j’ai vu mon moment venir », assure Anita Traoré.

« Une vigilance particulière et une sensibilisation doivent donc s’exercer à l’approche des départs en vacances, c’est crucial », poursuit Ramata Kapo. « Tout cela passe par une libération de la parole des femmes victimes de ces actes ainsi que par la mise en œuvre de moyens pour venir en aide aux jeunes filles qui le demandent. » L’association « Excision, parlons-en ! » avec l’aide de ses partenaires et notamment l’association « En avant toutes », met ainsi en place une permanence d’écoute en ligne gratuite et ouverte sept jours sur sept. Une prise de contact avec l’association, même une fois arrivé à l’étranger peut également aider. Comme pour Fadima, des institutions locales peuvent prendre le relais pour éviter le pire.

* Le prénom a été modifié.

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LOOPSIDER : "Le tabou de l'excision forcée de jeunes Françaises" (Vidéo du 14 juillet 2019)

CITOYEN 24 : Intervention de l'ACPPT (Vidéo du 1er juillet 2019)

20 MINUTES : "Plan contre l'excision: Une mutilation qui perdure et toujours beaucoup d'«idées reçues» (Article du 21 juin 2019)

VIOLENCES SEXUELLES Un plan interministériel de lutte contre cette mutilation sexuelle est lancé pour la première fois ce vendredi

Longtemps, le nombre de 53.000 femmes excisées vivant en France a été avancé. Tiré d’un rapport de l’Institut national d’études démographiques daté de 2009, il a été actualisé en 2015 par l’ONU. Désormais, on évalue à 60.000 le nombre de femmes victimes de cette mutilation génitale résidant en France. Un chiffre qui pourrait être sous-estimé.

Lourdement punie par la loi, cette pratique violente menacerait encore de nombreuses adolescentes françaises. Pour lutter contre l’excision, la secrétaire d’Etat aux droits des femmes doit lancer ce vendredi matin un plan entièrement dédié à cette problématique. Une première. A l’occasion de cette annonce, 20 Minutes dresse un état des lieux de l’excision en France.

De nombreuses idées reçues
« On a souvent des idées très arrêtées sur l’excision en France, déplore Marion Schaefer, vice-présidente du réseau associatif Excision, parlons-en !, on a l’impression qu’elle touche uniquement les femmes originaires, ou dont les parents sont originaires, de pays d’Afrique. Mais ce n’est pas vrai, tous les continents sont touchés, l’Amérique du Sud comme l’Asie ». Et cette mutilation n’est pas l’apanage d’une religion particulière. En Egypte, l’excision reste très répandue y compris dans les milieux chrétiens comme chez les Coptes. « Toutes les religions sont concernées, l’excision est une norme sociale, pas un rite », précise Marion Schaefer.

Pratiquée dans la majorité des cas lors de séjours des jeunes filles dans le pays d’origine de leur famille, l’excision est interdite en France et punie de 10 ans d’emprisonnement et 150.000 euros d’amende. Une peine alourdie à 20 ans de réclusion criminelle lorsque la mutilation est commise sur une mineure. « Il faut rappeler que même si elle est pratiquée dans un autre pays que la France, et même si vous n’avez pas la nationalité française, vous pouvez être condamné si vous êtes complice d’une excision », ajoute Isabelle Gillette-Faye, sociologue et directrice du Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles et autres pratiques traditionnelles (GAMS). Aujourd’hui, on estime que trois adolescentes françaises sur dix ont des parents originaires de pays dit « à risque ».

Disparités territoriales et formation
Autre idée reçue : les femmes excisées vivent essentiellement en région parisienne. « Certes il existe de grandes régions à risque en France comme l’Ile de France. Ce n’est pas un hasard si Marlène Schiappa a décidé de lancer son plan de lutte depuis la Seine-Saint-Denis. Mais la région Normandie est aussi très concernée – la ville du Havre notamment – comme la région Paca », rappelle Marion Schaefer. Une répartition géographique qui s’accompagne de disparités en matière de prise en charge et d’accompagnement médical ou psychologique des femmes excisées.

« Il faut arrêter de penser que tout peut être réglé depuis Paris. L’excision est pratiquée sur des Françaises qui vivent dans d’autres régions. Il faut repenser la formation des professionnels et l’accompagnement des victimes de façon locale », pointe Isabelle Gillette-Faye. Pour offrir une réponse décentralisée aux adolescentes inquiètes, le réseau Excision, parlons-en ! a lancé un site internet avec un tchat ouvert trois après-midi par semaine.

Quant à la formation des acteurs judiciaires et médicaux, elle devrait représenter un axe majeur du plan présenté ce vendredi. Une nécessité pour Marion Schaefer : « Souvent, les jeunes femmes que nous accompagnons nous expliquent qu’elles ont découvert leur excision lors d’une consultation médicale ou gynécologique. Et le discours adopté par les médecins n’est pas toujours adapté. Elles ne savent pas non plus qu’elles peuvent déposer plainte. Beaucoup de choses doivent encore s’améliorer ».

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GANGAN RTV: "L'ACPPT était au chevet de Mariama Camara..." (Vidéo du 3 mai 2019)

KONBINI : "Excisée à 13 ans, elle raconte" (Vidéo du 21 janvier 2019)

NAIRA CULTURE : "Ma rencontre avec Anita Traoré, présidente de l’association Chance et Protection pour toutes " (Article du 13 mars 2017)

Hier je rencontrais, Anita Traoré, Présidente de Association Chance et Protection pour toutes.

Il y a plusieurs semaines de cela, je décidais de conclure à un rendez-vous avec cette femme. Car j’étais à la recherche d’une femme excisée qui pouvait ainsi parler de son excision sans honte. Je voulais marquer ce mois de mars, consacré à la femme et à un combat en particulier. Pour celles qui ne connaissent pas, l’excision est une violente pratique qui consiste à mutiler partiellement ou totalement les parties génitales féminines de la femme. Cette opération qui est d’une violence extrême est alors pratiquée sur les bébés, les petites filles, les adolescentes ou sur des jeunes femmes adultes.

Selon les historiens, l’excision a été instaurer avant l’arrivée des trois religions monothéistes. Ce qui n’a donc pas de lien avec les religions…

Ceux qui la pratiquent se justifient donc sur le fait que cela empêcherait la femme d’aller voir ailleurs ou d’avoir des envies sexuelles. Certains estiment que exciser une femme est une obligation religieuse (ce qui est totalement faux car aucun livre sacré ne mentionne cette barbarie !). Mais l’excision c’est aussi plusieurs cultures qui se sont construites autour d’elle donc beaucoup croient toujours en celle-ci car c’est un moyen pour eux préserver leurs traditions, coutumes…

Elle est donc pratiquée chez plusieurs peuples peu importe les croyances religieuses (musulmanes, chrétiennes ou animistes). Plusieurs régions, pays et continents sont touchés par ce phénomène dont l’Afrique qui connaît l’un des forts taux de l’excision, l’Asie, l’Europe car de nombreuses filles nées en France ou ailleurs en Europe et qui sont originaires de pays qui la pratiquent en sont victimes. Nous avons aussi L’Amérique du Nord, L’Amérique du Sud et enfin l’Océanie.

Les conséquences sont nombreuses et terribles. Nous avons tout d’abord des conséquences psychologiques car l’acte est tellement barbare et violent, que les victimes en gardent un mauvais souvenir. Tout au long de leur vie, ces femmes ne peuvent décrire exactement la douleur et la souffrance endurée. Lors des grossesses ou accouchements, il y a celles qui meurent avec ou sans leur bébé car il y a des déchirures, des complications ou encore des saignements. Lors des relations sexuelles, les douleurs sont présentes mais il y a aussi le fait qu’elles ne ressentent pas forcément du plaisir et cela est inégal et humiliant.

Les infections ou brulures rythment le quotidien de ces femmes, au moment d’uriner ou de s’asseoir.

Enfin, beaucoup meurent durant l’acte du a des hémorragies, infections ou les chocs…

Dans le dernier recensement de 2004, on estimait qu’environ 53 000 femmes adultes étaient excisées et résidaient sur le territoire français.

Comme vous pouvez le constater, l’excision est un sujet tabou du a sa position sociale, culturelle et de son caractère violent. Il est donc très difficile d’aborder le sujet facilement avec ces femmes. Raison pour laquelle beaucoup d’entre elles n’arrivent pas ou ne veulent tout simplement pas aborder ce sujet.

J’ai toujours milité au plus profond de moi-même contre cette pratique car je la connais fausse, inégale et barbare. Ma propre mère en a aussi été victime à l’âge de 11 ans et elle a gardé un très mauvais souvenir de ce moment.

J’estime aussi que chaque femme a le droit de rester tel qu’elle est, tel que la nature la construite. On ne va pas enlever ce qui est juste et normal dans le corps féminin. Et une femme a bien le droit d’éprouver son plaisir, peu importe la manière dont elle le veut. Je pense que la femme souffre déjà assez dans ce monde !

Cependant, beaucoup d’entre elles ont décidé d’en faire leur combat. Dont Anita Traoré, ex candidate à l’élection de Miss Guinée France, présidente d’une association luttant contre toutes les violences faites aux femmes et en particulier l’excision.

Ce fut un moment de partage et tout simplement de plaisir avec elle. J’appréhendais beaucoup cet entretien car c’était mon tout premier, en vrai de vrai. Et surtout c’est celui que j’ai plus ou moins bien organisé lol.

J’ai découvert une femme très ouverte, attachante, belle, intelligente et j’en passe. Elle milite pour le bien être des femmes, elle n’hésite pas à prendre la parole en public et elle parle de ce sujet sans tabou.

Je vous donne rendez-vous dans le prochain magazine Radar Black ou mon entretien avec elle sera publié. Elle mérite qu’on reconnaisse son travail et enfin toute cette violence autour de cette pratique. Car j’estime que nous sommes tous plus ou moins touché par les problèmes de notre société.

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CHANGE.ORG : "Journée de lutte contre les violences faites aux femmes : le combat d’Anita" (Article du 25 novembre 2016)

Anita Traoré est la fondatrice et présidente de ‘’l’Association Chance et Protection Pour Toutes’’, une association qui vient en aide aux jeunes filles et femmes victimes de violences sexuelles. Avec Binta Diallo, Anita et les 100 000 signataires de leur pétition ont conduit le Ministère de l’Education nationale à intégrer la lutte contre l’excision au programme des collégiens. Elle-même victime de cet acte monstrueux, Anita a décidé de briser le silence. Elle revient sur son combat en cette journée symbolique.

Quand avez-vous décidé de vous mobiliser contre les violences faites aux femmes ?
Il y a un peu plus de 5 ans, j’ai perdu ma cousine de 8 ans suite à un viol à Conakry (Guinée).
Ce décès a concrétisé mon envie de créer mon association pour la lutte contre les violences à l’égard des femmes. L’augmentation des violences faites aux femmes ces dernières années en Guinée, mais également en France n’a fait que renforcer ma volonté de continuer ce combat.

Pourquoi avoir porté avec Binta Diallo une pétition contre l’excision ?
Il était naturel pour moi de rejoindre Binta dans ce combat, car l’élimination de cette pratique barbare me tient énormément à cœur. L’excision est une pratique néfaste qui continue à faire des victimes en France et ailleurs. Il y a quelques jours, un bébé de trois semaines a succombé à ses blessures après s’être faite excisée en Guinée. Je suis moi-même une victime de l’excision.

Pouvez-vous expliquer quel a été l’impact de votre pétition dans la lutte contre les violences faites aux femmes ?
Grâce à notre pétition, nous avons su sensibiliser des milliers de personnes contre l’excision. Nous avons reçu de nombreux messages de soutiens et de témoignages. Nous estimons avoir atteint notre objectif, qui était celui de faire réagir les pouvoirs publics. En effet, après plusieurs échanges avec Madame Najat Vallaud-Belckacem, la ministre de l’Education nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, j’ai eu l’opportunité de rencontrer Madame Marie-Cécile Naves, conseillère en charge de la santé, du sport, du handicap et de l’éducation populaire. Lors de cette rencontre, il a été convenu que l’excision sera intégrée au nouveau programme de la nouvelle réforme des collèges mis en place à partir de septembre 2016. Une matière intitulée « morale et civique » remplace l’éducation civique. Cette nouvelle matière permet aux élèves de débattre, de faire des jeux de rôle et d’avoir un temps d’échange sur les sujets comme l’excision, le mariage forcé, le respect de l’autre, etc. Néanmoins la lutte continue, car beaucoup de choses restent à faire.

Où en êtes-vous aujourd’hui dans votre combat ?
Nous continuons à dénoncer, à sensibiliser et à informer sur les violences faites aux femmes. Nous menons plusieurs actions ici et en Guinée.

Deux ans après la création de votre association « Chance et Protection Pour Toutes » contre les violences faites aux femmes, quels améliorations avez-vous observé ces dernières années en France ?
Malheureusement, depuis deux ans, nous n’avons constaté aucune amélioration concernant les mesures prises contre les violences faites aux femmes. Les chiffres restent implacables. Au moins cent femmes ont été assassinées en France par leurs conjoints ou ex conjoints depuis le début de cette année. Sans oublier celles qui sont quotidiennement victimes d’humiliation, de violences, de chantages, etc.

Que reste-t-il à faire ?
Quand la justice ne fait pas son travail, tout reste à faire, j’ai envie de dire.
En ce 25 novembre,  journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes, Jacqueline sauvage reste en prison, elle continue à être traitée comme un assassin. C’est révoltant et désespérant, mais nous ne baisserons pas les bras, nous continuerons à lutter contre toutes les formes de violences faites aux femmes.

Quel message voulez-vous envoyer aux décideurs politiques sur ce sujet ? Aux femmes concernées ?
Je voudrais dire aux décideurs politiques qu’il est urgent de prendre des mesures applicables. Car, il est bien de prendre des mesures, il serait surtout important de pouvoir les appliquées.
Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes a présenté ce mercredi 23 novembre en Conseil des ministres le 5e plan de lutte contre toutes les violences faites aux femmes. Ce plan d’action sur trois ans comporte 122 mesures destinées à faire baisser un nombre de victimes dramatiquement stable. Nous attendons donc de voir ce qui changera avec ce plan. Quant aux femmes victimes de violences, je voudrais leur dire de tenir bon, de ne jamais baisser
les bras. Contrairement à ce qu’on peut penser, il n’est pas facile de s’en aller quand on est sous l’emprise d’un bourreau qui nous menace de mort pour tout et n’importe quoi. Un mari qui menace de tuer vos enfants ou de vous les retirer. Pour ne citer que ces deux exemples. Il est impossible de partir d’un claquement de doigt. Je voudrais donc témoigner tout mon soutien à toutes les femmes victimes de violences pour leur courage et leur patience. Il est important de ne jamais abandonner, il faut continuer à se battre. Nous vaincrons !

Auriez-vous un conseil à donner aux personnes qui souhaiteraient lancer une pétition ?
Foncez ! Nous avons obtenu gain de cause. Vous pouvez à votre tour atteindre votre objectif. Ensemble nous pouvons changer les choses.

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DEUXIEME PAGE : "Interview : Anita Traoré, une parole libérée contre l’excision" (Article du 14 juillet 2016)

Anita Traoré porte un combat dur mais nécessaire : la lutte contre l’excision. Elle-même victime de cet acte qui laisse voir le poids des traditions et leurs conséquences, elle a décidé de briser le silence qui entoure une ignoble réalité, celle de millions de filles et de femmes. Nous avons pu discuter avec elle de sa lutte et de ses campagnes de sensibilisation auprès du grand public, mais aussi de l’importance du dialogue pour faire avancer les choses. Un exemple de résilience, de force et de courage.

L’excision demeure un tabou. Même si, en Afrique, cette coutume barbare qui implique l’ablation du clitoris et/ou des lèvres vaginales est en baisse, elle n’a pas encore disparu. En 2014, l’Unicef a recensé 130 millions de victimes dans le monde. Les pays où cet acte est le plus répandu sont la Somalie, la Guinée, Djibouti et l’Égypte. Et malgré une certaine prise de conscience de la communauté internationale – en novembre 2012, l’ONU a enfin adopté une résolution contre les violences génitales –, 30 millions de filles risquent d’être excisées au cours de la prochaine décennie, selon un rapport de l’Unicef intitulé « Mutilations génitales féminines/excision » publié en 2013.

Alors, que faire pour endiguer ce fléau ? Comment faire comprendre à ceux qui la pratiquent que l’excision est une torture infligée aux femmes, et que ses conséquences sont physiquement et psychologiquement désastreuses ? La solution est d’en parler ! Anita Traoré, une Française d’origine guinéenne, fait partie de ces femmes qui ont osé briser le silence. Excisée à l’âge de 8 ans, elle a d’abord caché son histoire, pour finalement se délivrer de ce passé longtemps considéré comme honteux. C’est une fois adulte qu’elle comprend ce qui lui est arrivé. À la fois révoltée et déterminée, la jeune femme décide de fonder en avril 2014 l’association Chance et protection pour toutes, qui se bat pour les droits des femmes et contre les violences qu’elles subissent : les mutilations génitales féminines, mais également le mariage forcé, les viols, le harcèlement de rue…

Quand son amie Binta Diallo a lancé, cette année, la pétition « Excision : brisons le tabou, parlons-en à l’école », qu’elle a adressée à la ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Najat Vallaud-Belkacem, Anita Traoré a été parmi les premières à la signer : « Ce que l’on veut, c’est inclure ce sujet dans les programmes scolaires. Nous savons que c’est ambitieux, mais il est nécessaire d’en faire un sujet fixe et non de se contenter de campagnes de sensibilisation éphémères comme c’est le cas actuellement. »

En quelques mois, la pétition a récolté plus de 106 000 votes et le soutien de la ministre. Les deux femmes ont également lancé le hashtag #Brisonsletabou sur les réseaux sociaux pour appeler le monde entier à la mobilisation. Pour Anita Traoré, cela ne fait aucun doute : « Il est temps de mettre enfin des mots sur des maux. »

Qu’est-ce qui a déclenché votre envie de vous battre contre l’excision ?

À 8 ans, j’ai été excisée en Guinée, comme toutes mes sœurs et mes cousines. À ce moment-là, l’excision n’était évidemment pas mon combat. Je savais seulement que cela devait m’arriver tôt ou tard. Il faut savoir qu’en Guinée, 96 % des femmes sont excisées. Certaines le sont vers 3 ans, voire à quelques mois seulement. Je suppose que cet acte est le symbole de la pureté de la femme. En tout cas, lorsque j’étais enfant, personne ne m’a expliqué les fondements de cette tradition. Si tant est qu’il y en ait.

J’en veux beaucoup à mes tantes qui ont organisé ce triste cérémonial – sans anesthésie, bien sûr – qui m’a couté une partie de moi-même, et sans en parler à mes parents. Ma mère n’a jamais voulu que ses filles soient excisées. C’est lorsque nous sommes allées en vacances chez ma grand-mère que cela s’est produit. Sur le coup, on ressent une immense douleur. Puis, le temps passe, et l’on se dit qu’après tout, c’était peut-être juste normal.

Mais lors de l’accouchement de mon premier enfant, j’ai eu énormément de complications. Les médecins m’ont expliqué que c’était à cause de l’excision. J’ai alors pris conscience de la mutilation qui m’avait été infligée, et j’ai décidé de militer contre. Il y avait déjà plusieurs associations qui luttaient contre ce fléau, mais nous ne sommes jamais assez. Avec tout ce que l’on fait, on a pourtant encore du mal à stopper ces violences, notamment dans les pays de l’Afrique de l’Ouest, mais également en France.

Quelles sont les conséquences de l’excision ?

On me demande souvent s’il y a des répercussions sur les rapports sexuels. C’est une question à laquelle je ne peux pas répondre puisque je ne sais pas ce que c’est de ne pas être excisée. La seule chose que je peux dire, c’est qu’avant même d’accoucher, j’avais déjà des problèmes, comme des infections à répétition, des règles douloureuses, je faisais de la rétention urinaire, etc. Parfois, j’aimerais vivre dans le corps d’une personne non excisée pour voir la différence.

Les complications médicales à court et à long termes sont donc courantes, tout comme les effets psychologiques : cauchemars et anxiété, dépression, colère, perte de confiance, rancœur… Ces sentiments vous envahissent, mais ils doivent servir de moteur, de force et d’énergie pour mieux lutter contre l’excision. De toute façon, je ne peux plus revenir en arrière, la seule chose que je peux faire, c’est avancer et faire en sorte que d’autres ne connaissent pas le mal que l’on m’a imposé.

Selon l’Institut national d’études démographiques, il y aurait en France 53 000 femmes ayant subi une mutilation génitale féminine. Et 11 % de leurs filles seraient aussi concernées. Pourquoi la France n’arrive-t-elle pas à endiguer ce fléau ?

Parce qu’il y a encore trop peu d’actions de sensibilisation par rapport aux violences faites aux femmes en général. Très peu de personnes savent ce qu’est l’excision. On la confond parfois avec la circoncision.

Sur le sol français, elle n’est plus pratiquée. En revanche, des jeunes filles françaises sont envoyées dans leur pays d’origine pour être mutilées – souvent durant les vacances scolaires –, ce qui augmente le nombre de victimes d’excision dans notre pays. J’en ai rencontré plusieurs. Toutes se sentent évidemment trahies. Je dirais même encore plus que moi, car vivant en France et de culture française, elles ne pensaient pas un jour devoir subir une tradition aussi arriérée et patriarcale. Car c’est bien pour « être dignes d’un homme », et donc d’être mariées, que les jeunes filles se font exciser.

Une fois qu’elles sont de retour, j’en parle avec elles le plus possible, je leur propose des solutions, comme la clitoridoplastie, une chirurgie réparatrice prise en charge à 100 % par la sécurité sociale. Il n’y a d’ailleurs qu’en France que cette opération est remboursée en totalité.

Quand avez-vous fondé l’association Chance et protection pour toutes, et pour quelle raison ?

Il y a quelques années, ma petite cousine de 8 ans est décédée des suites de sévices sexuels. J’ai alors fondé mon association dans le but d’aider les jeunes filles victimes de violences. Depuis avril 2014, nous intervenons en Guinée, où nous organisons des galas de charité, ainsi que dans le centre de la France, où nous travaillons en étroite collaboration avec la Cimade (Comité inter mouvements auprès des évacués, ndlr), le planning familial et les missions locales. Notre démarche est d’aider toutes les femmes en difficulté que l’on nous envoie, que ce soit dans leurs démarches administratives ou au niveau moral.

Nous n’avons pas encore les moyens de financer des locaux. Je reçois des victimes de violences chez moi. Avant de les rencontrer, je sais déjà d’où elles viennent, de quoi elles souffrent, etc. Généralement, il s’agit de jeunes femmes qui ne parlent pas très bien le français. Mon travail consiste à comprendre un peu plus que les autres personnes qui les ont reçues avant moi ce qui leur est arrivé et ce dont elles ont besoin. La plupart ont été victimes de violences sexuelles ou d’excision. Je commence donc par leur parler de ma propre histoire et, au fur et à mesure des rencontres, un climat de confiance s’instaure. Je deviens en quelque sorte leur confidente.

Comment avez-vous rencontré Binta Diallo ?

Nous nous sommes rencontrées en 2010 lors du concours de Miss Guinée France, pour lequel nous étions toutes les deux candidates. L’une des épreuves consistait à défendre devant le jury un projet humanitaire à réaliser dans notre pays d’origine. Celui de Binta était de lutter contre l’excision. Elle a remporté la compétition, puis a participé à des campagnes de sensibilisation et est intervenue dans les médias guinéens pour informer la population.

Il y a six ans, l’excision était tabou en Guinée. Aujourd’hui, on ose un peu plus parler de cet acte, pourtant interdit par la loi depuis 2000. La République de Guinée, deuxième pays au monde où les femmes subissent le plus de mutilations génitales, a en effet ratifié plusieurs textes internationaux qui luttent contre ces dernières, comme le protocole relatif aux droits des femmes en Afrique, dit Protocole de Maputo.

Votre pétition « Excision : brisons le tabou, parlons-en à l’école » a récolté exactement 106 577 signatures. Vous attendiez-vous à un tel soutien ?

Pour ma part, pas du tout. J’ai vraiment été étonnée de l’ampleur qu’elle a pris. Je me suis rendu compte que ce fléau touchait beaucoup plus de personnes que je ne le pensais.

La ministre de l’Éducation nationale a répondu à la pétition, et le 11 mai dernier, vous avez rencontré Marie-Cécile Naves, conseillère en charge de la santé, du sport, du handicap et de l’éducation populaire auprès de la ministre. De quoi avez-vous discuté ? Avez-vous obtenu les résultats escomptés ?

J’ai discuté une bonne heure de la pétition et exposé de nouvelles propositions pour renforcer les mesures déjà prévues par Najat-Vallaud Belkacem. Madame Naves m’a assuré que l’excision serait intégrée à la nouvelle réforme des collèges, qui sera mise en place en septembre 2016. C’est lors des cours d’enseignement moral et civique, au programme depuis cette année, que les élèves pourront débattre, faire des jeux de rôle et échanger sur des sujets comme l’excision, le mariage forcé ou encore le respect de l’autre.

Nous avons aussi évoqué la possibilité pour mon association de signer une convention avec le ministère. Nous pourrons ainsi intervenir dans des établissements scolaires dans le but d’informer les élèves et, surtout, de les sensibiliser aux violences faites aux femmes en général. Comme je travaille dans un CFA (centre de formation d’apprentis, ndlr), j’ai également souligné le fait que ces institutions ne bénéficiaient pas des campagnes de sensibilisation de l’Éducation nationale. Cette remarque a été prise en considération par Madame Naves. Les CFA pourraient donc bientôt être concernés par les prochaines opérations.

Évidemment, toutes ces mesures restent à accomplir. Avec Binta, nous restons attentives et veillerons à ce que les engagements pris par le ministère se concrétisent.

La lutte contre l’excision est donc l’affaire de toutes et de tous, et surtout de la jeunesse ?

C’est très compliqué aujourd’hui de dire que l’excision est l’affaire de toutes et de tous, puisque la plupart des gens ne savent pas réellement ce que c’est. Quant aux jeunes, lorsqu’on leur parle du problème de l’excision, on les sent perdu-e-s, voire décontenancé-e-s. D’où l’importance d’en discuter à l’école. J’ai d’ailleurs été très surprise lors de mes premières interventions en classe du grand intérêt dont ont fait preuve les élèves. Certain-e-s sont aussi venu-e-s me voir à la fin pour avoir plus d’informations sur mon association et savoir comment elles et ils pouvaient agir. Que l’excision s’inscrive dans les programmes scolaires serait donc un grand progrès.

Les politiques s’engagent (un peu), mais les artistes également. Cette année, à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre l’excision, le 8 février, la chanteuse franco-malienne Inna Modja est venue témoigner au siège de l’ONU, à New York, de la mutilation qu’elle a subie quand elle était enfant. Un drame qu’elle évoque notamment dans le morceau Speeches, en duo avec Oxmo Puccino. La chanteuse et comédienne malienne Fatoumata Diawara a aussi dénoncé la pratique de l’excision dans sa chanson Boloko. Que pensez-vous de ces femmes artistes qui s’engagent dans cette lutte ?

Je les soutiens à 200 %, car c’est en libérant la parole que l’on va pouvoir prendre le pas sur ce tabou. Il faut continuer d’en discuter pour faire évoluer les mentalités, surtout en Afrique. En France, on peut parler de beaucoup de choses, mais dans certains pays comme la Guinée ou le Mali, c’est plus difficile. Grâce à leur notoriété et leur musique, ces artistes arriveront sans doute mieux que d’autres à réveiller les consciences – les populations étant généralement plus réactives et sensibles aux paroles d’une célébrité qu’à celles d’une personne lambda.

L’ONU espère éradiquer l’excision d’ici 2030. Pensez-vous que cela soit possible ?

Oui, mais ça va être compliqué. Ces dernières années, plusieurs actions menées par les associations, les ONG ou encore les gouvernements – en 2015, la Gambie et le Nigeria ont interdit l’excision – ont aidé à lutter contre ce fléau. Malheureusement, il reste du chemin à parcourir avant de l’éradiquer totalement et d’imposer aux pays qu’ils appliquent les lois. Car tant que la justice ne respectera pas les droits humains et ne condamnera pas les bourreaux, on n’avancera pas.

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PARIS MATCH : "En France aussi, l'excision est une réalité" (article du 27 avril 2016)

Marie Desnos 25/04/2016 à 12:47, Mis à jour le 27/04/2016 à 16:00

Binta Diallo et Anita Traoré, deux jeunes Françaises d’origine guinéenne, militent pour que l’on parle de l’excision à l’école, pour briser le tabou et ainsi anéantir cette pratique qui touche encore 53.000 femmes et filles en France. Leur pétition a été signée par plus de 100.000 personnes, poussant la ministre de l’Education à leur répondre.

C’est avec beaucoup de pudeur, surmontée par son engagement, qu’Anita Traoré nous a parlé de sa lutte contre l’excision, et de son expérience personnelle. Cette jeune femme de 24 ans, française originaire de Guinée, a elle-même été victime, à l’âge de 8 ans, de cette mutilation génitale féminine (MGF) qui touche quelque 53.000 femmes en France et 200 millions dans le monde. Tout comme ses sœurs, et ses cousines. Sa mère n’était pourtant pas pour. Mais les traditions ancestrales ont la vie dure… Pourtant, à force de détermination, les mentalités évoluent. Cette militante en est l’exemple incarné.

Anita Traoré a fondé, en avril 2014, l’Association Chance et Protection Pour Toutes. Un projet qui lui tenait à cœur depuis longtemps. «Je voulais créer une association qui se bat pour les droits des femmes, contre les violences qui leur sont faites. Les MGF mais aussi le mariage forcé, les viols, le harcèlement de rue… », nous a-t-elle expliqué. C’est ce qu’elle a fait. Aujourd’hui, elle rencontre des victimes, et fait de la pédagogie, de la prévention dans les écoles. Evoquer sa propre expérience n’a pas été naturel. «C’est difficile d’en parler, reconnaît-elle. J’ai eu beaucoup de mal à le faire au début ; moins maintenant. Parce qu’il faut le faire, sinon comment les gens peuvent se rendre compte ?»

Les complications liées à l’excision sont quotidiennes
«Les complications liées à l’excision sont quotidiennes», souligne-t-elle, évoquant des «douleurs pendant les rapports sexuels» ou même «en faisant pipi». Et puis bien sûr à l’accouchement. Elle-même a eu des «complications» lorsqu’elle a donné naissance à son petit garçon en 2013. C’est sans doute ce qui a précipité son passage à l’acte. Sa maman n’était pas particulièrement favorable à son engagement. «Elle me disait qu’il y avait déjà plein d’associations qui le faisaient, sans réel succès.» Mais aujourd’hui elle constate ses bienfaits, et reconnaît que «c’est bien d’informer les gens».

Si les trois sœurs d’Anita ne sont pas engagées dans ce combat, elles sont également contre l’excision, et leurs filles ne sont pas mutilées. «Quand j’irai en Guinée avec mes nièces, personne n’ira les exciser», pense la jeune femme, rappelant toutefois qu’il faut toujours rester vigilante. «Vous savez, les excisions se pratiquent souvent à l’insu des parents. Elles sont minutieusement organisées, planifiées. Ensuite, les filles n’ont pas le droit de sortir de la maison pendant environ un mois.» Un tabou qui se perpétue, de génération en génération, sans qu’il y ait de fondement justifié pour le faire…

Najat Vallaud-Belkacem a répondu à leur pétition
D’où le nom de la pétition lancée sur Change.org avec son amie, «Brisons le tabou, parlons-en à l’école» . «Binta Diallo a initié cette pétition, nous a raconté Anita. Nous nous sommes rencontrées en 2010 pendant l’élection de Miss Guinée France, organisée par l’Association des jeunes Guinéens de France, et remportée par Binta. Elle m’a contactée pour savoir si je voulais bien me joindre à sa pétition. Nous avons donc uni nos forces –sa notoriété d’ex-Miss Guinée et mon association- pour porter cette cause.» «Ce qu’on veut, c’est inclure ce sujet dans les programmes scolaires, explique-t-elle. Nous savons que c’est ambitieux, mais il est nécessaire d’en faire un sujet fixe et non de se contenter de campagnes de sensibilisation éphémères comme c’est le cas actuellement.»

Incitée par les plus de 103.000 signatures, la ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, a répondu dimanche à leur pétition. Si elle affirme soutenir leur démarche, elle ne fait que lister des actions existantes de prévention et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles. «Quand nous avons vu sa réponse, nous étions ravie, mais nous avons un peu déchanté car ce n’est pas ce qu’on attendait», nous a confié Anita Traoré. «Les campagnes durent tout au plus une semaine dans chaque lycée, et tous les établissements scolaires ne sont pas concernés, a-t-elle poursuivi. Ça ne suffit pas.» Alors Anita et Binta vont poursuivre leur combat. Afin d’amplifier sa portée, elles ont lancé le hashtag #Brisonsletabou appelant tout le monde à publier sur la page Facebook de l’association une photo avec ce message.

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GUINNÉEMATIN.COM : "Diaspora guinéenne: A la rencontre de l’ONG « CHANCES ET PROTECTION POUR TOUS" (Article du 13 août 2015)

Dans le cadre de l’organisation d’un concert caritatif le samedi 22 août 2015, Guineematin a rencontré Anita Traoré, Présidente  de l’Association « Chance et Protection pour toutes », organisatrice de l’événement.
Très active depuis quelques années au sein de la Société civile guinéenne basée ici en France.  Dans la vie Professionnelle, elle est chargée de ventes et  d’accompagnement des jeunes au centre de formation d’apprentis de la ville de Tours en France.

Cet engagement précoce a débuté pour elle en 2010 lorsqu’elle fut candidate à l’élection de Miss Guinée France. Depuis cette aventure, elle n’a fait qu’accroître son engagement en restant toujours membre de l’AJGF (Association des jeunes guinéens de France) puis  depuis avril 2014 Présidente de l’Association « Chance et Protection Pour Toutes ».

Cet engagement trouve sa source dans sa Profonde sensibilité aux maux qui assaillent notre société et se traduit aussi par sa volonté ferme de vouloir apporter sa contribution à la Résolution de ces problèmes, particulièrement à celui concernant la Question épineuse des violences faites aux femmes du monde et celles de notre pays, la Guinée.

Madame Traoré en tant que Présidente Fondatrice l’Association « Chance et Protection Pour Toutes », pouvez-vous nous parler de son historique et son Objectif Principal ?

« Chance et Protection Pour Toutes », a été créée en Avril 2014. L’idée de création d’une ONG m’est venue à la suite de la mort de ma petite cousine de 8 ans, suite à une violence sexuelle en 2012 à Conakry.

L’objectif de cette Association vise d’abord à prévenir les situations de violences à l’encontre des femmes et des jeunes filles en sensibilisant sur les dangers de tels comportements au sein des familles et des conséquences  psychiques que cela  peut engendrer auprès des victimes. Elle vise aussi à venir en aide et protéger les femmes déjà victimes dans leurs intégrités physiques et morales suite à  des violences sexuelles.

Quelles sont les raisons de votre engagement personnel dans ce combat, les statistiques concernant les viols et autres violences envers les femmes chez nous en Guinée ?

Personnellement, je suis une victime, connaissant donc la Douleur que cela représente pour une femme d’avoir été abusé, il était essentiel pour moi de me lancer dans ce combat J’ai été plusieurs fois victime d’attouchements sexuels, et de violences sexuelles en Guinée, mais aussi ici en France, et cela par des proches de ma famille.

Au décès de ma petite cousine de 8 ans suite à un viol, mon silence s’est transformé en bavardage, j’ai pu parler à mes sœurs dans un premiers temps, puis à mon époux.

Le décès de ma cousine a eu un déclic dans ma façon de voir les choses,  c’est en ces moments de tristesse que je me suis dit qu’il fallait que je sorte de mon silence et que je me lance dans la lutte contre les violences sexuelles.

Quelques chiffres pour édifier le monde sur les violences sexuelles

Selon une enquête récente (mars 2015), soutenue par l’UNICEF,  81% des victimes de violences sexuelles sont des mineurs, 94% des agresseurs sont des proches.

Une victime sur deux est agressée avant l’âge de 11 ans, et une sur cinq a moins de 6 ans.

Selon un rapport de l’OMS rendu public en 2014, 20% des femmes dans le monde ont subi des violences sexuelles pendant leur enfance.

Ces agressions sur mineures sont très souvent liées à l’inceste. Dans 70% des cas, lorsque la victime a moins de 6 ans, l’agression est incestueuse. « Mon père m’a violé en moyenne 3 à 4 fois par semaine pendant plus de dix ans », témoigne l’une des victimes.

85 % des cas d’inceste durent plusieurs années et sont toujours accompagnés de mauvais traitements psychologiques et souvent de violences physiques (source : AIVI, manifeste des victimes d’inceste)
Ces chiffres seraient de plus sous-estimés, notamment en raison des tabous sur l’abus sexuel et des violences,  soit Près de 50 % des violences sexuelles  durant l’enfance font ainsi l’objet de déni ou d’amnésies traumatiques de la part des victimes, pendant des périodes plus ou moins longues. (Source : Putnam, F. Ten-year research update review : Child sexual abuse, American Academy of child and adolescent psychiatry, March 2013)

90 % des cas d’abus sexuel ne sont pas déclarés aux autorités (source : AIVI, manifeste des victimes d’inceste)
La loi du silence, les menaces, l’isolement, la honte, la peur, l’acte marquant fortement les victimes de violences sexuelles, sont les facteurs qui poussent les victimes dans un silence parfois total.

Il y a peu de statistiques précises sur les violences sexuelles faites aux enfants, car ces crimes sont souvent cachés, tabous et associés à un profond sentiment de honte qui empêche les enfants et les adultes qui les entourent de dénoncer leurs auteurs. Bien qu’il soit très difficile de quantifier ces abus, l’UNICEF estime que 150 millions de filles et 73 millions de garçons de moins de 18 ans auraient eu des relations sexuelles sous la contrainte ou subi d’autres formes de violence sexuelle et d’exploitation impliquant un contact physique (2009).

Quelles sont vos réalisations en France ? Vos activités ? Vos partenaires associatifs ?

Pour mener à bien nos projets, nous avons mis en place plusieurs cagnottes sur des sites comme leetchi:  https://www.leetchi.com/c/association-de-association-chance-et-protection-pour-toutes   et  doneo  :  http://www.doneo.org/2_index_membre.php?action=association&id_association=6560

Aussi, nous organisons un très grand concert caritatif le samedi 22 août prochain de 16h à minuit au 90 avenue André Maginot à Tours, avec la participation des chanteurs Djibril Soumah (Koumi) et Dj Sisqo de Berlin, ce concert sera suivi par une soirée dansante qui se déroulera  dans une somptueuse salle de 16h à minuit.

Nous aurons le plaisir d’accueillir Madame Marthe Dédé Bokony , fondatrice de l’association OMEGA, Aissatou Souaré, Miss Guinée France 2015, la Miss diakhankés France 2015, Miss Benin France Europe 2015 et tant d’autres Personnalités VIP, la liste est longue…

Par l’occasion qui m’est offerte sur votre site Guineematin.com, je lance une invitation à tous , Nous invitons tous les guinéens de France, d’Europe à  venir nous soutenir ce samedi 22 aout.

Disons tous ensemble le Samedi 22 août de 16h à minuit au 90 avenue André Mignot 37100 Tours nord, Stop aux Violences envers les femmes, Stop aux violations Sexuelles, car ce sont nos mères, nos tantes, nos cousines, nos sœurs, nos nièces, nos filles qui le subissent ou qui en sont exposées, cela n’arrive pas qu’aux autres. Alors, n’attendons pas qu’une de nos proches le subisse pour agir.

Envisagez-vous élargir vos champs d’intervention en Guinée où êtes-vous déjà sur place ?

En France nous travaillons, mon équipe et moi pour les victimes de violences sexuelles en Guinée.

Nous avons constitué une équipe à Conakry, avec laquelle nous travaillons à distance.

Nous nous rendrons en Guinée au mois de décembre prochain si tout va bien.

Ce premier voyage sera consacré à la première phase que nous appellerons   » Et SI ON EN PARLAIT » . Le but de cette première phase sera de sensibiliser les guinéens, d’informer un maximum de familles sur nos aides et nos ateliers  » familles – enfants –  adultes  » qui seront organisés dès notre arrivée en Guinée. Pour ce faire, nous comptons faire une grande campagne de sensibilisation, nous allons aussi rencontrer les victimes et leurs familles, car cela est  primordial pour nous, afin d’établir des protocoles de prise en charge, aussi bien pour les victimes récentes, que pour celles qui ont subi des violences sexuelles depuis plusieurs années. Bien évidement nous ne comptons pas limiter nos aides aux victimes de la Guinée.  Notre souhait serait d’aider et d’accompagner le plus de victimes de viols en Afrique.

Qu’attendez-vous comme soutien de la part des guinéens ?

La lutte contre les violences sexuelles doit être la lutte de tous, cela n’arrive pas qu’aux autres.

Les violences sexuelles sont fréquentes, leurs conséquences gravissimes, leurs prises en charge largement insuffisantes. Le sujet reste tabou et mal documenté.

Nous comptons sur le soutien et la bonne volonté des guinéens pour nous accompagner au mieux dans cette lutte.

Nous faisons appel à toutes personnes désireuses de nous prêter main forte pour combattre ce fléau.

Merci à toutes les personnes qui nous soutiennent depuis le début de cette aventure, merci aux médias guinéens. le combat ne fait que commencer.

Contact facebook : https://www.facebook.com/associationchanceetprotectionpourtoutes

Depuis la region Parisienne, Mouctar Sall pour Guineematin.com

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